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Liberation: Les Américains vous avaient conseillé de ne pas intervenir en Ossétie, pourquoi lavez-vous fait ?
Saakachvili: Jai toujours pensé que lOssétie du Sud était un territoire sans importance pour la Russie. Même quand la tension a commencé à monter là-bas, jai cru que cétait du bluff et quon pouvait tout arrêter.
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Mikhaïl Saakachvili : Jai cru que cétait du bluff et quon pourrait tout arrêter
Larmée russe maintenait hier plusieurs positions à lintérieur du territoire géorgien, notamment dans et autour du port de Poti, malgré les protestations de Tbilissi et des pays occidentaux. Alors que Nicolas Sarkozy a convoqué une réunion des dirigeants européens sur le dossier géorgien, le 1er septembre à Paris, le président géorgien, Mikhaïl Saakachvili, 40 ans, revient pour Libération sur les événements de ces dernières semaines, qui ont vu son pays partiellement envahi par la Russie.
Le Conseil de la Fédération de Russie examine aujourdhui la demande de reconnaissance de lOssétie du Sud et de lAbkhazie, pensez-vous avoir perdu définitivement ces deux régions ?
Non, je crois que cest une faute grave, une tentative de changer les frontières de lEurope par la force. Cela va avoir des résultats désastreux, y compris pour la Russie. Je ne crois pas que quelquun dans la communauté internationale sera assez irresponsable pour laccepter. Cest une invasion classique qui na rien à voir avec le droit international. On essaie de tuer le droit des nations.
Mais quoffrez-vous aux Abkhazes et aux Ossètes du Sud ?
Mais qui sont les Abkhazes et les Ossètes ? On a expulsé 500 000 personnes dAbkhazie, la moitié de la population dOssétie du Sud vient dêtre chassée. Ce nest pas un séparatisme local classique. Les Russes ont envoyé des généraux russes qui ont proclamé quils sont le gouvernement dOssétie du Sud. Et maintenant, on dit que ce sont des séparatistes et que la Géorgie ne peut pas récupérer ces territoires. Poutine a a transformé Tskhinvali [la capitale de lOssétie du Sud, ndlr] en un camp militaire russe. En Abkhazie, 90 kilomètres entre Soukhoumi et Zougdidi sont presque vides. Cest un territoire magnifique absolument dépeuplé. Où sont ces gens-là ? Quand on a affaire à une enclave assiégée, gardée par larmée russe et soumise à la propagande russe, qui dit que les Géorgiens sont là pour tuer tout le monde, il nest pas vraiment possible de parler de pourparlers et de processus de paix.
Laccord de cessez-le-feu conclu sous légide de Nicolas Sarkozy est-il bon ?
Cétait une opération de sauvetage de la part de Sarkozy. Je lui suis personnellement reconnaissant. Si lUnion européenne avait été présidée par un petit pays ou si Sarkozy était parti en vacances, il y aurait eu de grandes chances que les chars russes soient déjà à Tbilissi. Sarkozy a été le premier à venir et à faire des déclarations fortes. Les trois premiers jours, la Géorgie a réussi à arrêter lavance russe. Ensuite, 500 nouveaux chars sont entrés en Géorgie par le nord, il fallait se retirer et, à ce moment-là, Sarkozy est arrivé et nous a donné le temps nécessaire pour nous regrouper. Cétait le maximum quil pouvait faire.
Les Américains vous avaient conseillé de ne pas intervenir en Ossétie, pourquoi lavez-vous fait ?
Il ny a pas eu dinvasion en Ossétie du Sud parce que nous y étions déjà. Les positions des deux parties étaient parfois éloignées de 20 à 30 mètres. Les postions géorgiennes étaient à 2 kilomètres de Tskhinvali. Ce nest pas une question de choix. Les affrontements avaient déjà commencé : le seul choix était de repousser les Russes ou de capituler et accepter un régime comme celui de Vichy. Cétait un plan bien préparé. Les pilotes que nous avons capturés navaient pas volé depuis quinze ans et ils ont été mobilisés quatre jours avant linvasion. Je mattendais à une attaque en Abkhazie. Jai toujours pensé que lOssétie du Sud était un territoire sans importance pour la Russie. Même quand la tension a commencé à monter là-bas, jai cru que cétait du bluff et quon pouvait tout arrêter. Jai commis cette faute parce que je pensais que lattaque principale aurait lieu en Abkhazie. Pas quils pourraient attaquer Tbilissi.
Pensez-vous que la Géorgie a toujours des perspectives dintégration dans lUnion européenne et dans lOtan ?
Plus que jamais. Il y aura le 1er septembre, à Paris, une réunion spéciale des dirigeants européens. Cest encore une initiative audacieuse de Nicolas Sarkozy. Les pays dEurope centrale reconnaissent dans la Géorgie leur problème. Désormais, il est très facile dimaginer des chars russes en Estonie, par exemple. La Russie a essayé de donner le sentiment quelle avait remporté une victoire sur lOtan. A long terme, elle ne peut pas gagner ce jeu. Ce nest pas lUnion soviétique. Les dirigeants russes aiment trop largent. Ils sont très liés à lOccident. Ils aiment la Côte dAzur plus que celle de lAbkhazie. Ils ont beaucoup dargent dans les banques suisses et tous leurs enfants étudient en France ou en Grande-Bretagne.
Vous plaidez donc pour des sanctions visant les dirigeants russes ?
Ce serait très efficace. Imaginer quils ne puissent plus aller à Courchevel lhiver, pour eux cest absolument impossible.
Lire aussi en Rebonds, page 36".
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http://www.liberation.fr/actualite/monde/347379.FR.php